jeudi 7 février 2008

Cambadélis et Moscovici «d’accord sur leurs désaccords»

PS. Les fidèles de Strauss-Kahn ont chacun leur vision pour l’horizon 2012.
David Revault d’Allonnes
QUOTIDIEN LIBERATION: jeudi 7 février 2008

Quelle stratégie pour les amis de Dominique Strauss-Kahn ? Depuis son départ pour Washington et le FMI, le débat n’en finit pas de rebondir au sein de son courant. D’un côté, les partisans de l’initiative du premier lieutenant, Jean-Christophe Cambadélis, lequel, en jouant le rapprochement avec les proches d’Arnaud Montebourg et de Laurent Fabius, tente d’empêcher un affrontement entre Ségolène Royal et Bertrand Delanoë. De l’autre, ceux qui penchent pour la stratégie d’un Pierre Moscovici affirmant sans ambages son appétit pour le poste de premier secrétaire du PS. Ainsi qu’une certaine compatibilité avec l’ex-candidate à la présidentielle. Jean-Christophe Cambadélis résume : «Il n’y a ni cristallisation, ni mécontentement. Mais il est vrai qu’il y a des discussions.» Pierre Moscovici le dit plus joliment encore : «Nous sommes d’accord sur nos désaccords…»

Epistolaire. Des désaccords qui ont récemment pris une tournure épistolaire. Dans une lettre datant de mi-janvier, Jean-Paul Planchou, conseiller régional d’Ile-de-France, exprime ses doutes concernant l’initiative des «reconstructeurs» engagée par Cambadélis, jugeant «difficile d’accepter une alliance» avec des socialistes «dont les références sont les plus éloignées», en l’occurrence les fabiusiens. «D’autres camarades […] exprimant des positions sensiblement plus proches des nôtres pourraient y être ralliés», estime l’élu francilien, qui fustige des «tactiques d’appareil». Et plaide pour une «candidature de Pierre Moscovici.» Réponse, amicale mais ferme, de Jean-Christophe Cambadélis : «Pourquoi revenir sans arrêt sur des questions que nous tentons de surmonter en marchant ? Et en plus publiquement, en envoyant un texte à tout le parti ? Ce qui, tu l’avoueras, ne facilite pas la tâche de Pierre Moscovici…»

La visite surprise de DSK, il y a quinze jours au grand raout socialiste de La Mutualité, avait, dans ce contexte, un double objectif. D’abord, perturber le grand retour de Ségolène Royal dans les instances du PS. Mais, aussi, calmer le jeu dans les rangs : «Il s’agissait de montrer que DSK n’était pas sorti de la course, et que ce n’était pas la peine de s’affoler», décrypte un proche. L’exercice de clarification, pourtant, ne semble pas avoir eu l’effet escompté. «Il n’est pas dans une stratégie de retour volontaire. Je trouve que ça ne serait pas tout à fait digne de lui», commente dans la foulée Pierre Moscovici. Une formule qui a «surpris» les proches de DSK. Au point qu’au cours d’un déjeuner du courant, l’ancien ministre de la Défense, Alain Richard, exige un démenti… «Nous n’étions pas ravis, convient Jean-Marie Le Guen, député de Paris. Dans ce qui nous rassemble, il y a la fidélité à Dominique, et la croyance qu’il a un rôle majeur à jouer en 2012. Pierre Moscovici s’affirme indépendamment de cette réflexion.» L’intéressé, d’ailleurs, l’assume : «Je suis libre. Je ne prends mes ordres nulle part. DSK étant à 5 000 km, on ne peut pas fonctionner comme s’il était chef de courant…»

Stratégie. Reste que pour certains strauss-kahniens, le profil de Moscovici, secrétaire du PS chargé de l’international, ne convient pas. Jean-Paul Huchon, président de la région Ile-de-France : «On n’a pas besoin de quelqu’un qui a une forte connaissance de l’international et une réflexion intellectuelle. Plutôt de quelqu’un de très expérimenté, capable de faire tourner notre parti.» Jean-Marie Le Guen, lui, tacle sa stratégie delano-royalo-compatible : «On ne pourra pas être à la hauteur de la gauche en reconstruisant l’alliance des oui au référendum. Nous avons besoin de refonder un nouvel alliage. Pas d’une petite synthèse feignante et opportuniste, d’un arrangement de plus.» Pierre Moscovici le lui rend bien, qui «souhaite une vraie rénovation, pas un arrangement factice. Je trouverai dommage que la démarche des reconstructeurs se limite à la destruction de Ségolène Royal. On ne va pas passer quatre ans à faire du "Ségolène bashing". Et au sein du courant, je ne sens pas vraiment d’antipathie à l’égard de ma démarche.» Michèle Sabban, conseillère régionale francilienne, abonde : «Alors que DSK a toujours porté la réforme, on a l’impression que Cambadélis reforme un syndicat des anciens. Moscovici voit beaucoup plus loin et peut opérer une synthèse avec Delanoë, et même avec Royal.»

Options. Un proche de DSK résume les deux options : «"Camba" est obsédé par l’idée de créer un rapport de force suffisant pour dissuader Royal et Delanoë de poser leur candidature, sans quoi notre courant implosera entre les deux. D’où la nécessité de s’allier avec des gens avec qui on n’est pas d’accord. "Mosco" considère que si les deux autres renonçaient à se présenter, il faudrait un profil consensuel. Et qu’il pourrait faire l’affaire.» Plus ou moins d’accord, donc, pour préserver les chances d’un retour de DSK pour 2012. Mais de moins en moins sur les moyens d’y parvenir…

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