samedi 24 janvier 2009

Changer de modèle économique : du local au global

Chères amies, chers amis,

Aujourd’hui, j’ai présidé, à la Maison de la région Poitou-Charentes, une conférence sociale réunissant les entreprises et les salariés (et leurs organisations syndicales et professionnelles), ainsi que les acteurs de l’économie sociale et des représentants des comités d’entreprises.


Nous avons adopté un plan d’actions dans le cadre de cinq priorités (pour consulter le détail, rendez-vous sur le site de la Région) :
  • Soutien à l’activité économique avec 83 millions d’euros d’investissement en Région et 50 millions pour le financement des entreprises ;
  • Création de 4 700 stages de formation et la création de 300 emplois pour ceux qui en ont le plus besoin ;
  • Mise en place d’aides à la mise en œuvre de véhicules à un euro par jour pour les salariés d’entreprises volontaires de la région, ainsi que pour les stagiaires de la formation professionnelle, avec 2 000 premiers bénéficiaires dès 2009 ;
  • Renforcement du dialogue social par une aide aux comités d’entreprise des sites industriels en difficulté économique et la création de comité de bassins d’emplois ;
  • Soutien aux filières qui innovent et s’engagent dans le développement de la croissance verte pour créer les emplois de demain (filière bois, filière sur l’énergie renouvelable avec le plan photovoltaïque, la filière de l’agriculture biologique, l’écotourisme).

Dès demain, j’irai sur le terrain constater la bonne mise en œuvre de ces efforts de la Région en faveur de l’emploi, en me rendant à Parthenay dans les Deux-Sèvres. Après une rencontre avec les petits producteurs agricoles sur le marché, je rendrai visite à des créateurs d’entreprises grâce aux Bourses régionales Désir d’entreprendre.

Dans le même esprit, je présiderai lundi la Commission permanente du Conseil Régional qui sera consacrée au développement de l’apprentissage, à la création du service public régional de la formation professionnelle et à la mise en œuvre de l’ambitieux plan régional de développement du photovoltaïque.


Cet engagement de la puissance publique au niveau régional est indispensable mais ne suffit pas. La crise économique et financière que nous traversons nécessite une réflexion globale sur le système capitaliste tel qu’il fonctionne – ou plutôt dysfonctionne.

C’est le sens du déplacement d’étude à Belém au Brésil que je vais effectuer de mercredi à lundi pour participer au Forum social mondial, à l’invitation du Recteur de l’Université de Belém (ce déplacement est financé sur fonds privés et personnels, c’est-à-dire ni par la région Poitou-Charentes ni par Désirs d’avenir).


Depuis le premier Forum social mondial à Porto Alegre en 2001, la réflexion sur un autre monde possible est impérative. J'ai d’ailleurs accueilli dans ma Région, à deux reprises, les universités d'été d'Attac parce que je crois salutaires ces débats et ces échanges dont les militants altermondialistes ont pris l'initiative contre la pensée dominante il y a une dizaine d'années et aujourd'hui en déroute.

J'ai toujours été et je suis plus que jamais convaincue qu'on ne peut pas rebâtir une proposition alternative et crédible aux désordres actuels du monde sans être à l'écoute de tous ceux, sans exception, et en particulier des militants, des associations, des citoyens qui s'engagent sur le terrain, qui résistent à la folle logique du profit à tout prix, qui inventent d'autres façons de poser les bonnes questions et d'autres façons de faire.

La 8ème édition du Forum Social qui se tient à Belém revêt une importance particulière, non seulement parce cette grande rencontre revient dans le pays fondateur qui lui donna son impulsion originelle, mais également parce que l'état du monde (en proie à une crise financière, économique, sociale, écologique, politique, morale...) témoigne dramatiquement de l'échec des politiques ultra-libérales et de l'idéologie qui fut celle de la révolution conservatrice dont on voit aujourd'hui les dégâts planétaires.



Un cycle se clôt


A nous de faire que celui qui s'ouvre, au-delà des promesses sans lendemain de moralisation superficielle, remette réellement les choses d'aplomb en redonnant aux citoyens un vrai pouvoir de décision sur le destin collectif.

Le Brésil et le travail conduit par le président Lula permettront, sur place, d’approfondir deux idées :

  • C’est un laboratoire de pratiques politiques innovantes (dont le Budget participatif créé à Porto Alegre, très largement mis en pratique dans tout le pays, et que j’ai repris en Poitou-Charentes au travers du Budget participatif des lycées) dont certaines peuvent être reprises en France.
  • C’est un grand pays, non pas émergent mais émergé, qui comptera de plus en plus dans les nouveaux équilibres du monde.

Plusieurs sujets abordés par le Forum social de Belém seront, à mes yeux, majeurs :

  • La crise alimentaire ;
  • Les biens publics dont l'accès libre doit être garanti à tous (l'eau, la culture, l'éducation, le net, etc.) avec, entre autres, le problème du brevetage du vivant ;
  • La lutte contre l’esclavage moderne avec une charte d’engagement signée par quatre états brésiliens dont le Para, la région dont Belém est la capitale, qui en détient le triste record (notamment dans les grandes propriétés agricoles) ;
  • La situation et l’avenir de l’Amazonie (une journée lui sera dédiée) au travers de trois dimensions : le changement climatique, la biodiversité et le respect des peuples indiens.

Tous ces sujets sont un concentré des grandes questions de la mondialisation marchande et du productivisme court-termiste à l'opposé d'un développement respectueux des équilibres écologiques.

Et puis, enfin et toujours, la démocratie participative sera au cœur du Forum : de l'élaboration des décisions ("partager les décisions pour prendre les bonnes", disons-nous en Poitou-Charentes) au contrôle citoyen de l'application des politiques publiques (rendre des comptes). Je suis d’ailleurs fière que le travail de la Région Poitou-Charentes sur la démocratie participative ait été labellisé dans le cadre de « 2009 année de la France au Brésil » par le comité franco-brésilien d’organisation.

Voilà en quelques mots les raisons de mon déplacement d’étude au Forum social mondial de Belém.

Mais je vous rendrai compte bien sûr au fur et à mesure les débats qui s’y tiendront et les entretiens que j’y aurai (à commencer, dès mon arrivée, par un rendez-vous avec le président du Parti des travailleurs du brésil, Ricardo José Ribeiro Berzoini).


Cordialement,

Ségolène Royal

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